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Témoignage de Caroline

J’ai eu un cancer du sein en 2013, j’ai été suivie par un oncologue. Je lui ai fait confiance. Pourtant avec le recul je me suis rendue compte que cette personne n’était pas dans l’accompagnement. J’ai tout fait, chimio, rayons… J’ai été en rémission pendant environ quatre ans.

Ce cancer hormonal est revenu en se déplaçant sur les bronches. Je suis repartie avec ce même médecin et ça s’est très mal passé. Il ne s’est pas occupé de moi et j’ai terminé en urgence à l’hôpital, je ne pouvais plus respirer, on ne m’avait donné aucun numéro d’urgence et aucune procédure en cas d’étouffement, c’est ma famille qui s’est occupée de moi. J’ai changé d’oncologue.

J’ai rencontré un médecin pro soins palliatifs et ça a été extraordinaire. Il m’a dit que mon cancer n’était pas guérissable mais qu’on pouvait le “contenir”, ce à quoi j’ai répondu « ce qui m’importe c’est la qualité de vie plutôt que la quantité ». Je voulais le moins d’examens possible, le moins d’interventions inutiles. Je voulais vivre au jour le jour, vivre l’instant présent et profiter de ce qui m’était donné. Depuis février, nous vivons de cette manière-là avec l’équipe de soins palliatifs, ma famille et mes proches. Tout se passe quasiment par téléphone avec quelques consultations à l’hôpital si besoin, ça ne coûte pas grand-chose, je bénéficie de traitements “légers”. Les gens me disent « mais Caroline tu ne veux pas faire un scanner ? une radio ? » Ce à quoi je leur réponds « et toi ? Parce que toi, tu ne le sais pas mais tu as peut-être plein de trucs ! Moi je sais ce que j’ai et je vis bien avec ma maladie. Quel est l’intérêt d’aller à l’hôpital alors que je sais qu’il n’y a rien de particulier à faire ». Pour moi, il faut bien plus de courage pour aller à l’hôpital très régulièrement, faire une chimio, perdre ses cheveux, ne plus pouvoir manger agréablement sans être nauséeuse, que de poursuivre sa vie à la maison et vivre chaque instant avec bonheur et dans la paix.

Je me porte vraiment très bien avec mon cancer, j’ai le temps de voir ma famille, mes amis, je peux manger ce que je veux, j’ai mes cheveux, c’est la vie ! J’ai la pêche, je vis l’instant.

Je n’aime pas ce terme : se battre, je préfère accueillir. C’est comme le surf, je suis sur la vague et je me laisse aller dans son sens. Souvent, c’est l’homme qui veut maîtriser la vie, la maladie, alors que c’est inéluctable. Je ne vais pas guérir, c’est sûr mais par contre je vais avoir de très bons moments et peut être plus longs que lors d’un traitement plus “agressif”. Tout est décidé avec l’équipe médicale, Nous sommes partenaires. C’est bien plus confortable et rassurant pour moi.

C’est en amont que les choses se passent, à l’annonce de la maladie, avant d’entrer dans tout protocole.

La question de l’euthanasie ne se pose pas pour moi lorsque la bonne décision est prise en amont. Quand on est dans un processus médical lourd, en sachant qu’on ne peut pas guérir, je comprends qu’on puisse souhaiter mettre fin à sa vie. Mais aujourd’hui, moi, je vis avec ma maladie, je n’ai pas de souffrance, ni morale, ni physique. J’avance, à mon rythme, avec ma famille, mes amis et l’équipe soignante.

Le débat sur l’euthanasie ne se pose pas au bon moment. On l’aborde alors que les personnes sont déjà dans un système qui les déshumanise. C’est en amont qu’il faut penser l’accompagnement des personnes pour leur permettre de vivre leur fin de vie.

Il faut remettre l’accompagnement au cœur du système médical, c’est essentiel. Par exemple, au début de ma maladie, j’ai eu des fractures spontanées de vertèbres. A l’hôpital, je me suis rendue compte que pour le médecin je n’étais rien d’autre qu’un cas avec un numéro. Les soins palliatifs c’est essentiel, pour la fin de vie mais pas que, dès le démarrage de la maladie, l’accompagnement en soins palliatifs c’est prendre la personne dans sa globalité, je ne suis pas seulement six vertèbres fracturées.

On n’a plus cette logique des médecins de famille qui pensaient les patients dans leur globalité parce qu’ils connaissaient leur parcours, leur famille. Il faut reconstruire l’humanité dans le système de santé. Dès les études en médecine, il faut instaurer une part énorme de prise en compte des patients dans leur globalité et pas qu’au moment de la fin de vie. C’est une culture à instaurer pour la fin de vie bien évidemment mais aussi pour toute la médecine en général.

admin7905

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